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Spectacles

Roxane Bruneau : Craindre les tapis rouges, puis remplir le Centre Bell

Les stars se bousculent à l'ouverture de La Ronde 2022

Roxane Bruneau l’a souvent répété en entrevue, elle n’est pas née la couche bordée de nouilles. La chanteuse ne visait pas le firmament quand elle commettait ses vidéos humoristiques candidement déposées sur le web, quand un producteur l’a prise par la main, quand l’accrocheuse « J’pas stressée » nous a fait connaître sa voix claire de rockeuse sans malice.

Les cinq dernières années ont été un véritable tourbillon. « Ça n’a juste pas de bon sens », assentit-elle.

Aujourd’hui, une Roxane comblée, transportée, touche aux étoiles, sans l’avoir cherché. Paniquée à l’idée que son rêve s’effondre, notre authentique cultive néanmoins encore une hantise des tapis rouges et des kodaks. Paradoxal? Retour sur un conte de fées où la princesse anticonformiste se vêt de noir et soude ses pieds, plus confos en espadrilles qu’en escarpins, bien au sol.

Dans moins d’un mois, ce p’tit bout de femme interprète de « Des p’tits bouts de toi » aura pour elle seule les immenses Centre Vidéotron (7 avril) et Centre Bell (14 avril). Le sourire qui s’étire sur ses lèvres est celui de la béatitude, de l’extase. Une extase humble, presque timide, mais une extase quand même.

Showbizz.net rencontre Roxane le mardi 14 mars, au studio montréalais Showmedia, dans Centre-Sud, alors que la sensation de 32 ans s’accorde une pause pour s’entretenir avec des journalistes, un à un. On est à un mois, jour pour jour, de « son » Centre Bell. Fébrile?

« Normalement, je serais super anxieuse, mais je pense que c’est parce que je ne le réalise pas totalement encore », confirme-t-elle. « Mais ça va. Je suis en répétitions avec mon band, on est comme une petite famille et j’ai du fun... »

Que se passera-t-il ce soir-là, et une semaine plus tôt, dans l’amphithéâtre cousin de la Vieille-Capitale? Ne comptez pas sur Roxane pour éventer le moindre secret. Outre que ce sera la fête de ses deux albums, Acrophobie (2020) et Dysporie (2017). « Je vais piger dans les chansons que les gens aiment, et les chansons que moi, j’aime, et je vais faire un "melting pot" de ça... » Des reprises? « Je ne suis pas tant "reprises", dans la vie, mais je ne peux pas dire non... » De la pyrotechnie, de la technologie, des décors grandioses, des effets, des invités, des licornes? « Il va y avoir du crémage! », balance Roxane en s’esclaffant. Son look, lui, demeurera le sien, celui dans lequel elle se sent bien, confortable, qui lui permet de donner son maximum pour ravir sa horde : pantalons noirs, chandail noir, veste noire. L’artiste place sa mise en scène elle-même, un aspect créatif de son métier qu’elle adore et voudrait éventuellement creuser davantage dans sa carrière.

« Je peux te dire que si tu es déjà venu en salle voir le spectacle "Acrophobie", et que tu reviens au Centre Vidéotron ou au Centre Bell, tu ne seras pas déçu, parce qu’il y a plein de chansons ajoutées, plein de "stunts", de belles surprises… »

Voilà, vous savez tout. Ou presque. Pour le reste, vous la reverrez là-bas.

Or, à l’orée de pareille importante étape, une sorte de bilan s’impose. Alors, Roxane, qu’est-ce qui explique tout « ça »? Les plus de 100 000 albums vendus dans un contexte si peu favorable à l’achat de disques? Les salles pleines, les palmarès, les sept Félix (dont deux d’Interprète féminine de l’année), les gamines qui frétillent à la seule évocation de ton nom? Les projets fous, allant jusqu’à la production d’un documentaire sur ta personne (date de diffusion encore indéterminée)?

« Fouille-moi », lit-on dans son regard aussi émerveillé que reconnaissant.

« C’est comme un miracle », échappe-t-elle dans un gloussement d’incrédulité. « Je ne sais pas ce qui s’est passé. J’ai dû faire de quoi… Je remercie le ciel, mais je ne sais pas en quoi je crois. Je me demande ce que j’ai fait, et à qui, pour mériter tout ça. Je ne sais pas si je crois aux anciennes vies… (Sourire) Tu comprends? Toutes ces affaires de spiritualité-là…Mais, clairement, il y a une bonne étoile pour moi. Des fois, j’ai l’impression que je ne mérite pas tout ça. Et d’autres fois, j’ai l’impression que je le mérite. On est dans une ère ou tout est blanc ou noir, et moi, je suis vraiment dans une zone grise, où je ne suis sûre de rien, de ce qui se passe en ce moment. »

« ...Mais j’ai du fun en cr*sse! », complète-t-elle.

À 10 ans, Roxane Bruneau rêvait un peu de foules. Mais plus modestes. « Je m’imaginais jouer de la guit’ dans les parcs et les métros, que mes amis allaient me reconnaître à cause de mon chapeau, et qu’ils allaient me donner de l’argent. Je ne me voyais pas méga. Je ne m’imaginais pas remplir un Centre Bell, mettons. »

Belle naïveté de jeunesse. À l’époque, et à l’adolescence, et à l’entrée de la vingtaine, c’était d’humour que fantasmait notre Roxane. La musique, c’était « toute seule chez [elle] ». « À un moment donné, j’ai sorti une toune sur Internet, et ç’a pogné... » Ledit producteur mentionné plus haut, Raymond Du Berger, a flairé le potentiel. Depuis, Roxane continue de faire des blagues, sur scène, en vidéo, sur ses plateformes, et elle remplit le Centre Bell, mettons.

« Mais tu ne me verras jamais la première chanter au karaoké et, quand on fait un feu, je ne sors pas ma guit’ pour chanter. Dans le privé, tu ne m’entendras pas chanter mes propres chansons! »

Sa transparence continue d’épater. Publiquement, Roxane parle de tout, de sa blonde, même de la médication qui l’aide désormais à gérer ses tourments. Prenez-la comme elle est ou pas du tout. What You See Is What You Get. L’American Dream, Roxane Bruneau le vit « À [sa ]manière », comme l’auteure-compositrice l’entonne dans l’un de ses plus gros tubes. Une approche qui détonne de la superficialité de son milieu, elle le sait trop bien.

« J’appelle ça "jouer au show-business". Moi, ça, ça me joue dans la tête. Les tapis rouges, c’est ma hantise. Prendre des photos, je déteste ça! (rires) Moi, j’aime faire mes vidéos dans ma cave, faire mes trucs. Je ne suis pas l’artiste qui a le plus d’amis dans le showbiz non plus, parce que je suis entrée tard. Je n’ai pas fait d’émission comme "Star Ac" ou "La Voix", donc je n’ai pas de cohorte… Moi, j’ai mes amis de la vraie vie encore, et mon band, et mes tech [techniciens]. C’est ma famille, mon noyau, mes humains préférés. Oui, je me sens peut-être un peu décalée... »

Avant le glam, la native de Delson, sur la rive-sud de Montréal, qui a souvent déménagé par la suite, se fendait juste pour survivre. Chez Pizza Hut, pendant six ans. Puis, dans un centre d’appel. « J’ai connu des bouts où il n’y avait pas de bouffe dans mon frigidaire. Une chance que je travaillais dans un restaurant! » Elle n’a jamais eu de « plan ».

« Je mettais ce que je ressentais sur papier, je le chantais. Dans ma chanson "Partout", dans le refrain, revient : "On est des centaines comme moi", "...des milliers comme moi", "…des millions comme moi". Je me suis rendu compte que le monde se sent comme moi. OK, ils me voient dans leur TV, mais quand je ne suis pas dans la TV, je mange des toasts au beurre de peanuts chez nous, et je ne "feele" pas ben, des fois! (rires) Je pense que le monde s’est reconnu là-dedans. »

Quand les prestigieuses portes du Centre Vidéotron et du Centre Bell se refermeront derrière elle, le matin du 15 avril, Roxane Bruneau retournera à sa tournée. Aux festivals cet été (elle participera notamment à celui-là). À ce troisième album qu’elle concocte sans stress. Sans pression de date fixée. Elle continuera de rouler son millage « à [sa] manière ».

« De l’avoir fait, ça sera vraiment un accomplissement. Je suis vraiment fière de moi. Mais je ne veux pas faire trois Centre Bell par année. Je veux continuer de faire des shows. Ça peut être des shows devant 100 personnes, j’aime autant la vibe... »

Pour s’informer des activités de Roxane Bruneau et se procurer des billets pour ses spectacles au Centre Vidéotron et au Centre Bell, on consulte son site web.

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