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Une mélodie bien connue, mais toujours agréable à écouter

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3.5
Notre critique

Bien que classique, le long métrage s'avère d'une humanité certaine, parlant constamment avec son coeur, rappelant qu'il se fait encore du cinéma populaire de qualité.

Il est impossible de sortir d'un long métrage d'Emmanuel Courcol sans être le moindrement ému. Dans Cessez-le-feu (2016), un ancien soldat interprété par Romain Duris retrouvait le goût à l'existence grâce à l'amour. Lors d'Un triomphe (2020) qui était produit par Robert Guédiguian et Dany Boon, un comédien défendu par Kad Merad arrivait à convaincre des prisonniers à monter la pièce En attendant Godot. Cette idée de renaissance se retrouve à nouveau au coeur de son chaleureux En fanfare, qui a obtenu sept nominations aux Césars (les Oscars français), dont celui du meilleur film.

Elle s'incarne littéralement dans le corps de Thibaut (Benjamin Lavernhe), un chef d'orchestre de renommée internationale en attente d'une greffe de moelle osseuse. Lorsque des tests d'ADN révèlent qu'il a été adopté, l'homme part à la recherche de son frère Jimmy (Pierre Lottin) qui décide de l'aider. Pour le remercier, peut-être acceptera-t-il de diriger la fanfare locale. Si tout semble opposer ces deux êtres issus de milieux différents, ils pourront toujours compter sur l'amour de la musique.

Cette oeuvre attachante ne manque pas de thèmes féconds, que ce soit la fratrie, la transmission, la résilience et le déterminisme social. Le scénario écrit à dix mains multiplie les liens entre les vies des frangins afin de rappeler ce qui les sépare, mais surtout ce qui les rapproche. L'écriture n'est pas nécessairement la plus subtile, comme en font foi certains clichés humoristiques et des dialogues à la fois didactiques et moralisateurs. Elle n'en demeure pas moins sincère et bienveillante, faisant la part belle aux bons sentiments.

Il ne faut pas s'attendre à beaucoup de surprises en découvrant En fanfare. Le récit est balisé et parfaitement prévisible, amenant le spectateur exactement là où il s'attend. Le jour et la nuit avec La visite de la fanfare (2007) d'Erin Kolirin, un opus enchanteur qui jouait sur des notes similaires. La mise en scène est conventionnelle, au plus près des situations et des individus, en misant tout sur la musique. À ce sujet, la trame sonore remarquable fait naître l'émotion sans trop manipuler le cinéphile: un petit exploit lorsque le mélo vient se pointer le bout du nez.

La force d'Emmanuel Courcol est de concevoir de beaux personnages. Depuis ses premiers scénarios concoctés pour Philippe Lioret (dont les puissants L'équipier et Welcome), il arrive à créer des figures de chair et de sang qui existent réellement à l'écran. Ici, son mélange d'acteurs talentueux et de comédiens non professionnels fonctionne car chacun et chacune sont à l'écoute de l'autre. C'est notamment le cas de Sarah Succo (vue dans Les invisibles et réalisatrice de Les éblouis) qui offre un jeu tout en finesse.

Le duo en place s'accapare la part du lion, bien que la chimie soit quelque peu discordante. Solide, peu importe le rôle, Benjamin Lavernhe (L'abbé Pierre: Une vie de combats) offre une performance juste et nuancée. Il se fait toutefois éclipser par Pierre Lottin qui brûle d'une rage intérieure. Comme dans le récent Quand vient l'automne de François Ozon, l'interprète révélé dans Les Tuche ne fait qu'une bouchée de ses partenaires. S'il continue comme ça, il deviendra le prochain Benoît Magimel.

En fanfare ne remportera sans doute pas le César du meilleur film. Il est moins éclaté qu'Emilia Pérez, moins bouleversant que L'histoire de Souleymane et moins mémorable que Miséricorde. Bien que classique, le long métrage s'avère d'une humanité certaine, parlant constamment avec son coeur, rappelant qu'il se fait encore du cinéma populaire de qualité.