Le docu-série The Sons of Sam: A Descent Into Darkness revient sur la tristement célèbre série de meurtres qui a plongé la ville de New York dans un climat de peur et de paranoïa au milieu des années 1970. Des crimes sordides qui avaient alors été revendiqués par un tireur pouvant frapper à tout moment, et s’identifiant sous le pseudonyme de « Fils de Sam ».
Le jeu du chat et de la souris entre les forces de police de la grosse pomme et le tueur est passé au niveau supérieur lorsque ce dernier s’est mis à envoyer des lettres faisant part de ses intentions et de ses états d’âme, jouant un peu plus avec la patience - et les compétences - des enquêteurs attitrés au dossier.
Le tout jusqu’à ce qu’un homme, David Berkowitz, soit arrêté et s'identifie comme la seule et unique personne à l'origine de ces homicides.
Mais pour le journaliste et auteur Maury Terry, l’arrestation de Berkowitz venait avec beaucoup plus de questions que de réponses.
Au fil des décennies suivantes, ce dernier allait développer une véritable obsession pour cette affaire, convaincu que Berkowitz n'avait pas agi seul. Une enquête qui allait le mener à pousser ses recherches toujours un peu plus loin, révélant les dessous beaucoup plus sinistres d’une investigation que le NYPD a voulu clore beaucoup trop rapidement.
La longue et sinueuse saga du Fils de Sam était en soi un sujet tout désigné pour le genre de structures narratives généralement exploitées par Netflix pour ses docu-séries de type « true crime ».
Meurtres en série, travail journalistique tournant à l’obsession, rituels dits sataniques, théories du complot, implications politiques, enquêtes bafouées… Tous les ingrédients sont réunis.
The Sons of Sam démarre d'ailleurs en trombe en nous faisant suivre le déroulement de l’enquête jusqu’à sa prétendue résolution. Le rythme est haletant, et l’ambiance funeste à souhait.
Puis la série créée par Josh Zeman prend soudainement un pas de recul pour permettre à Maury Terry de faire son entrée en scène, et tenter de combler les trous béants laissés par une enquête de police inachevée.
La série a été échafaudée à partir des notes du journaliste, qui travaillait sur une nouvelle version de son livre The Ultimate Evil, faisant état de ses nombreuses macabres découvertes dans ce dossier. Une réédition qui ne fut toutefois jamais publiée en raison des problèmes de santé du principal intéressé.
Terry étant décédé il y a quelques années, c’est Paul Giamatti qui agit ici à titre de narrateur en lisant les notes de Terry. Et le simple timbre de voix de l’acteur contribue largement à l'ambiance que Zeman cherche à installer.
Car en soi, The Sons of Sam est un docu-série exécuté dans les règles de l’art, présentant un mélange d’images d’archives et d’entrevues avec des intervenants ayant côtoyé de près l’affaire et/ou Maury Terry.
Mais là où The Sons of Sam tire particulièrement son épingle du jeu, c’est dans la façon dont il parvient à susciter une vive réponse émotionnelle chez le téléspectateur par son utilisation des images d’archives.
Des images qui ont ici une aura et une magnitude, ne servant pas seulement qu’à transmettre une information ou à la replacer dans un certain contexte. Ce qui n’est pas peu dire pour un projet de cette nature.
La simple image d’un lampadaire éclairant timidement une voiture stationnée dans une rue déserte est suffisante pour nous rendre inconfortables.
L’extrait de David Berkowitz marchant vers le poste de police à la suite de son arrestation demeure encore franchement impressionnant, tout comme son entretien avec Maury Terry enregistré plusieurs années plus tard.
Cette mise en scène est d’autant plus amplifiée par un montage insistant (dans le bon sens du terme) et une bande originale on ne peut plus lugubre.
Il y a quelque chose de réellement transcendant dans la manière dont nous est racontée cette histoire, laquelle fut marquée par une série de revirements dignes d’un scénario hollywoodien.
Par l’entremise de cette dynamique, Josh Zeman parvient aisément à nous faire comprendre comment toute cette affaire a pu tourner à l’obsession pour Maury Terry.
Ceci étant dit, la minisérie de quatre épisodes coupe radicalement les coins ronds dans le dernier droit, lorsque sont soudainement remises en question certaines méthodes et déductions émises par le protagoniste.
En l’espace de quelques minutes, nous avons droit à un tout autre portrait de l’homme dont nous avions été appelés jusqu’ici à s’identifier à la quête, mais aussi à défendre le point de vue et les hypothèses.
Le problème, c’est que la série fait très peu pour nous aider à mieux comprendre l’origine de ces critiques, voire où et comment Terry a fait fausse route. Et nous réalisons du coup qu’un pan tout de même important de cette histoire fut à peine effleuré par Zeman.
Pour une enquête dont nous ne connaîtrons fort probablement jamais le fin mot de l'histoire, une telle décision est loin d'être négligeable.
Le tout est d’autant plus suivi par une ultime révélation visant à confondre les sceptiques, et invalider certaines de ces attaques.
The Sons of Sam: A Descent Into Darkness demeure néanmoins un compte-rendu aussi troublant que captivant d’une série de crimes qui a secoué l’Amérique, de même qu’une illustration dérangeante de la nature profondément politique de ce genre d’affaires, et de la façon dont les médias de masse peuvent contribuer à « sensationnaliser » la peur.
The Sons of Sam: A Descent Into Darkness est disponible dès maintenant, sur Netflix.