Dans le cadre du lancement de la nouveauté Janette - Les jeunes et la vieille, qui sera présentée pendant les fêtes sur les ondes de Télé-Québec, j'ai eu l'immense bonheur et privilège de m'entretenir avec la femme de l'heure, Janette Bertrand, qui brille de mille feux à l'aube de ses 101 ans.
Comme bien d'autres personnes, j'ai grandi avec les enseignements de cette grande dame, qui nous a permis de mettre des mots et des sentiments sur des sujets souvent tabous. Je porte un regard tendre sur les moments, passés avec ma regrettée maman, à cuisiner les recettes de Janette ou à regarder L'Amour avec un grand A et Parler pour parler, des instants précieux et inoubliables de complicité et d'apprentissage.
Encore aujourd'hui, Janette Bertrand fascine par sa vivacité d'esprit, son écoute et son discours bienveillant. Quelques jours après qu'elle se soit entretenue avec des centaines de personnes au Salon du livre de Montréal, en marge de la sortie de sa nouvelle oeuvre littéraire Cent ans d'histoire : Vous m'avez raconté le Québec, elle a bien voulu me donner de ses nouvelles.
« Moi, ça va très bien. Je suis un petit peu fatiguée, mais je suis vraiment très bien. Moi, je suis bien quand je mène beaucoup de projets à la fois, quand ma tête fonctionne à tour de manivelle », me lance-t-elle en riant. En effet, on peut croire que Janette Bertrand est tombée dans la marmite de la passion dès son plus jeune âge, ce qui l'a amenée à avoir un parcours florissant et exceptionnel et à briser de nombreuses barrières. « Si j'arrête, ben là, je me mets à penser à tous les bobos que j'ai, et j'en ai de nombreux. Alors que quand je suis bien occupée, je n'y pense pas. Je pense que j'ai 20 ans. Ma tête est là, ma tête va bien. »
Moi, ça me fatigue de me reposer.
Bien que ce fut un ajustement pour elle d'accueillir la vague d'amour qui l'a enveloppée dans la dernière année, Janette Bertrand assume maintenant pleinement qui elle est et ce que son parcours représente pour les femmes du Québec : « Écoute, moi, je sais à quel point ça a été difficile pour moi de briser les codes établis d'être une femme, puis de ne pas être acceptée comme femme. Enfin, je récolte ce que j'ai semé! C'est tard vous me direz, j'aurais pu récolter à 80, mais non, je récolte là ce que j'ai semé. »
Elle poursuit : « Il faut que j'assume. Le plus dur à accepter, c'est que moi, je ne me considère pas comme un modèle du tout, mais les faits sont que, moi, je n'ai pas eu de modèle de vieille personne. [...] Donc le modèle que je suis maintenant, je l'assume. Tu sais, les gens sur la rue, je viens de finir le Salon du livre, j'ai parlé à des centaines de personnes qui me disent "je veux vieillir comme vous". Tu sais, pour vieillir comme moi, il faut travailler. C'est ça! Il faut avoir du travail, il faut être occupé, il faut avoir une grosse famille, il faut être occupé! »
Moi, j'ai été et je suis gâtée, j'aime le monde, j'aime parler aux gens et c'est ça que je fais dans la vie. Alors, c'est un plaisir!
En ce sens, Janette Bertrand insiste sur l'importance de la vieillesse, un mot qu'elle endosse pleinement, notamment dans son nouveau projet télévisuel : « Je veux redonner aux gens ce que ça veut vraiment dire. Il y a des jeunes, puis il y a les vieux. Au bout de la vie, il y a les vieux. On est vieux. Tous ces euphémismes me rendent un peu... C'est comme d'essayer de sucrer le salé. »
« L'humain, il naît et il meurt. C'est inexorable. Il n'y a personne qui ne meurt pas », dit-elle, réaliste. « Moi, j'ai la chance d'avoir 10 ans de plus, d'avoir 20 ans de plus que j'espérais. Puis j'en profite. J'en profite. J'en profite pour faire ce que je veux. Moi, c'est travailler. Si ce n'est pas travailler ce que tu veux, tu ne travailles pas. Tu fais ce que tu veux! » En ce sens, Janette Bertrand invite toutes les personnes âgées à profiter d'une vieillesse heureuse, enrichissante et foisonnante de projets.
Si je pouvais le passer, ce message-là!
Par le fait même, elle m'exprime l'une de ses peurs : « Moi, je n'ai pas peur de mourir, j'ai peur de m'éteindre. Je suis quelqu'un d'allumée, de très allumée sur les problèmes des autres, sur ce qui se passe. Je suis allumée. Et je trouve que beaucoup de centenaires sont comme éteintes. Parce qu'elles ont arrêté trop tôt de se préoccuper des autres. »
En ce sens, elle me relate l'histoire de son père, qui a arrêté de travailler à 85 ans. « Il est devenu vieux instantanément ». Elle martèle : « Il faut s'occuper, pour ne pas penser à nos bobos. »
Dotée d'une candeur étonnante et d'une formidable intelligence, Janette Bertrand trouve encore les mots justes pour nous faire réfléchir et nous émouvoir. Je vais chérir cet entretien téléphonique très longtemps, et ses mots sauront m'accompagner pour la suite d'une vie que j'espère féconde, comme la sienne.
La nouveauté Janette - Les jeunes et la vieille sera présentée le samedi 6 décembre à 19 h sur les ondes de Télé-Québec.
Dans ce projet, Janette Bertrand tend aujourd'hui le micro à ceux et celles qui écrivent l'avenir : la nouvelle génération. C'est avec bienveillance qu'elle écoute des jeunes de 10 à 21 ans lui parler de leur réalité et des défis qu'ils vivent au quotidien. Elle espère que jeunes et moins jeunes seront au rendez-vous!



