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Critique

Daniel Lavoie offre un sobre 40e anniversaire à son album Tension Attention

Le spectacle Tension Attention - 40 ans de Daniel Lavoie

Le Tension Attention de Daniel Lavoie a 40 ans. Quatre décennies de « Tension Attention » et de « Ils s’aiment » dans nos oreilles, nos coeurs et nos mémoires. Mais, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, jeudi soir, c’était à tout le répertoire de l’estimé chanteur franco-manitobain, qui a la réjouissance très humble dans son habit noir, qu’on rendait hommage.

Daniel Lavoie n’a jamais été omniprésent au Québec, médiatiquement parlant, parce qu’occupé partout sur le globe. Il l’est encore moins depuis quelques années, établi qu’il est en Italie avec sa compagne depuis bientôt deux ans – où il profite de la « meilleure température au monde », scande-t-il à son entourage professionnel – et absent de la scène depuis presque six ans. Il a même fallu le flair de l’allumé producteur Martin Leclerc, a raconté le principal intéressé en début de spectacle, pour convaincre le jubilaire de jubiler un peu, justement, sur ce parcours étincelant amorcé bien avant 1983, mais consacré sous l’oeil du public environ à cette période, grâce à l’album Tension Attention, et toujours acclamé. Le parterre de Wilfrid-Pelletier était presque entièrement rempli, jeudi, ce qui en dit long de la fidélité des Québécois envers ce fier représentant de la culture francophone partout dans le monde, Lavoie étant plébiscité autant en Europe qu’en Asie.

Jeudi, en cette rentrée montréalaise (et cinquième représentation) de sa tournée-anniversaire, l’heure était aux festivités. Pas nécessairement aux confettis et aux paillettes, parce que l’homme de 74 ans, toujours digne, n’a jamais été d’exubérance et d’excentricités. Mais c’était soirée de grands succès, de (Je voudrais voir) New York à Notre-Dame de Paris, et de souvenirs (très) brièvement racontés, articulés de la toujours impeccable diction d’un Daniel Lavoie encore apparemment en grande forme. Comme l’évocation du beau garçon qu’il fut jadis et qu’on a tellement voulu limiter à la chanson de charme. Mais les anecdotes n’ont pas été légion, parce que les mondanités, on réitère, Lavoie n’en est pas entiché.

« Je commence à m’habituer, un peu... », a glissé l’auteur-compositeur-interprète, presque timidement, à la fin de la généreuse clameur qui a couronné une évidemment attendue « Je voudrais voir New York » , à mi-concert. Il a répété son quasi malaise à se faire encenser un peu plus loin, affirmant être plus serein derrière son piano que sous les lumières des projecteurs, et s’excusant de balbutier, toujours, même 40 ans plus tard. On peine à y croire, mais ne dit-on pas que les plus grands sont les plus simples?

Une très reconnaissante Sylvie Paquette flanquée de ses récits folk pop, a installé un début de complicité en première partie. Puis, dans une sobre, classique, soyeuse et distinguée mise en scène de Michel Poirier, où les quatre musiciens et deux choristes du célébré sont disposés derrière lui sur une plateforme drapée de noir, contrebasse majestueusement érigée au centre, dans une atmosphère souvent très jazzée et langoureuse, dans des croisements de somptueux éclairages de toutes les couleurs, Daniel Lavoie a revisité ses titres de toutes les années, en commençant, délectation suprême pour les fidèles, par « J’ai quitté mon île ». « Jours de plaine » et l’incontournable et pimpante « La danse du smatte » allaient suivre. « Boule qui roule », « Dans l’temps des animaux », « Mes vacances d’été », et autres « Que cherche-t-elle », toutes magnifiées et rendues vivantes de cordes et de percussions, aucune dénaturée, toutes amplifiées par la solennité de l’instant, ont mené jusqu’à une « Belle », qui portait mieux que jamais son nom. Les rayons lumineux blancs qui pointaient alors vers le ciel étaient particulièrement délicats et évocateurs sur l’immortel texte de Plamondon.

Daniel Lavoie a ratissé si vaste dans son passé, jeudi, qu’il a même blagué qu’il y avait plusieurs pièces « oubliables » sur Tension Attention, disque pourtant prétexte à notre présence devant lui. Ce serait fausse représentation de n’annoncer que le matériel dudit opus dans le programme de tournée, a-t-il badiné. Mais, de l’oeuvre en question, il avait réservé l’indissociable « Tension Attention » pour la fin. L’ambiance partagée plus tôt ne prêtait pas aux déhanchements malgré le caractère festif du refrain bien connu, et on aurait bien voulu entendre les spectateurs réagir davantage à ses folies et ses lignes de vie. Son encore émouvante ode à la romance naïve, « Ils s’aiment », portée par l’hôte d’abord assis à son précieux piano, puis debout au coeur de son espace, allait quelques secondes plus tard recevoir beaucoup plus chaleureuse hospitalité.

Daniel Lavoie présentera le spectacle Tension Attention - 40 ans en tournée partout au Québec au moins jusqu'à l'automne. L'album-compilation J'ai quitté mon île - 14 chansons d'un autre temps est également disponible. Plus de détails sur son site web.

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