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Si le Boss a aimé, qui sommes-nous pour le contredire?

3.5
Notre critique

Jeremy Allen White offre une performance électrisante, n’hésitant pas à plonger dans ses parts d’ombre pour livrer des scènes bouleversantes.

Après nous avoir subjugués dans la série à succès The Bear, pour laquelle il a été maintes fois récompensé, Jeremy Allen White endosse un nouveau rôle complexe, cette fois dans le film Springsteen : Délivrez-moi de nulle part, où il incarne le Boss lui-même, Bruce Springsteen, alors dans une période déterminante de sa vie et de sa carrière.

Le long métrage, écrit et réalisé par Scott Cooper, d’après l’oeuvre Deliver Me from Nowhere: The Making of Bruce Springsteen's Nebraska de Warren Zanes publiée en 2023, s’intéresse à une courte période dans la vie de cette icône américaine du rock, alors que l’on replonge au début des années 80. C’est un moment trouble pour Bruce Springsteen, qui vient de terminer une tournée triomphale et qui retourne au New Jersey, l’endroit qui l’a vu naître, pour une nouvelle phase de création. L’inspiration est au rendez-vous, mais le résultat est différent de ce que tout le monde attendait. Hanté par des souvenirs de sa relation conflictuelle avec son père, un homme qui a dû affronter ses propres démons, Bruce Springsteen se laissera emporter dans une spirale vertigineuse où l’amour, les blessures d’enfance, la création et la dépression s’entremêlent. Le résultat, l’album folk Nebraska, marquera un temps fort dans la carrière de l’artiste.

C’est dans ce contexte que Jeremy Allen White offre une performance électrisante, n’hésitant pas à plonger dans ses parts d’ombre pour livrer des scènes bouleversantes. L’acteur réussit, en évitant la caricature, à rendre justice à l’inspiration de ce film, autant d’un point de vue de la voix, puisqu’il interprète lui-même les chansons du film, que dans l’attitude. Son travail lui a d’ailleurs valu l’accolade du Boss lui-même, qui a entériné le long métrage.

À ses côtés, on retrouve deux autres acteurs qui élèvent l’ensemble. D’une part, l’excellent Jeremy Strong prête ses traits à Jon Landau, celui qui a été et est toujours le gérant de Bruce Springsteen, un homme calme, à l’écoute et compréhensif, qui a épaulé son artiste dans toutes les étapes de sa création, malgré les doutes. Cette amitié est la note dominante de cette carrière fulgurante. D’autre part, Stephen Graham, dont la performance dans la série Adolescence a récemment été récompensée, donne vie au père de Bruce Springsteen, un homme complexe, frappé par des problèmes de santé mentale et une dépendance à l’alcool. Bien que sa partition soit moindre, il réussit à marquer les esprits, notamment dans une scène finale avec Jeremy Allen White qui ne laissera personne indifférent. Odessa Young tire également son épingle du jeu, avec magnétisme, dans le rôle fictif de l’amoureuse.

Ce qui est intéressant avec cette proposition de Scott Cooper, c’est qu’elle peut s’adresser autant aux adeptes de Bruce Springsteen qu’à ceux qui ne le connaissent que très peu. Certes, le scénario se perd un peu entre les trop nombreux thèmes abordés – l’enfance, l’amour, la dépression, l’amitié et la rédemption – demeurant trop souvent en superficie. Le résultat, qui ne sort pas nécessairement des sentiers battus, génère toutefois l’envie d’en apprendre davantage sur cet artiste hors du commun, qui a milité pour conserver son authenticité dans les moments les plus difficiles de sa vie. Une intégrité qui force l’admiration.

Springsteen : Délivrez-moi de nulle part ne fera peut-être pas son chemin jusqu’aux cérémonies de remise de prix annuelles, mais demeure un visionnement plutôt captivant, voire inspirant. Si le Boss a aimé, qui sommes-nous pour le contredire?