Les cinéphiles attendaient impatiemment ce cadeau de Noël. Avant même sa sortie officielle en salles, cette première réalisation solo de Josh Safdie depuis sa «séparation amicale» d’avec son frère Benny se méritait trois citations aux Golden Globes, dont une dans la prestigieuse catégorie de «Meilleur film musical ou comédie». En déballant cette œuvre dans un cinéma près de chez vous en ce 25 décembre, vous mettrez bel et bien la main sur un des plus beaux présents que le Père Noël puisse offrir aux amateurs de cinéma : Timothée Chalamet.
Marty Supreme est campé dans le New York des années 50. On y suit Marty Mauser, interprété par Chalamet, jeune vingtenaire et as du tennis de table rêvant de gloire, dans un pays où son sport est largement ignoré. Après une série de mauvaises décisions ainsi qu’une humiliation lors d’une compétition internationale, Marty devra amasser rapidement une grosse somme d’argent pour se rendre aux championnats mondiaux, disputés au Japon, et regagner sa grandeur perdue.
Ceux qui s’attendent à un film de sport risquent d’être déçus. Si le tennis de table est la motivation première derrière tout ce que Marty entreprend, il occupe une place presque secondaire dans le scénario. On ne s’intéresse pas à l’ascension d’un champion, mais bien à la déchéance de quelqu’un qui essaye peut-être un peu trop fort de l’être.
Marty n’a rien du héros sportif classique. Sa liste de défauts est interminable : Égoïste, manipulateur, imbu de lui-même, insolent. Toutes les raisons sont bonnes pour le haïr. Il est si malhonnête, qu’il se ment souvent à lui-même. Pourtant, son charisme légendaire lui permet d’entraîner ses proches dans ses combines et de les faire couler avec lui. C’est un beau parleur. Comme il le dit lui-même : «Il serait capable de vendre une paire de souliers à un amputé.»
Timothée Chalamet interprète Marty avec brio. Sa performance est de loin l’attrait principal du film. Il dépeint avec justesse tous les travers de Marty, mais le rend assez sympathique pour nous le faire aimer. Il a beau dire les pires horreurs à ses proches, on finit par le lui pardonner et en rire. Non seulement sa nomination aux Golden Globes est pleinement méritée, mais parions qu’il part avec une longueur d’avance pour l’obtention du trophée.
Le reste de la distribution offre des performances très honnêtes, quoiqu’un peu moins étincelantes. Mentions spéciales à Odessa A’zion, touchante en amie d’enfance éperdument amoureuse de Marty, malgré le peu de considération que celui-ci manifeste à son égard. Sans oublier Kevin O’Leary, qui en est à son premier rôle dramatique. Cet entrepreneur, au tempérament bouillant et impitoyable, étonne dans le rôle de Milton Rockwell… un entrepreneur au tempérament bouillant et impitoyable!
Le réalisateur et scénariste Josh Safdie s’en sort plutôt bien, même sans l’apport de son jeune frère. Sa réalisation dynamique parvient à extraire le maximum d’intensité des scènes de tennis de table. Ceci dit, le scénario aurait eu avantage à être resserré. À mi-parcours, le récit devient redondant et longuet. Par chance, la séquence finale nous tient en haleine et permet de pardonner quelques imperfections. L’histoire rappelle aussi parfois un peu trop les deux derniers opus des frères Safdie, Good Time et Uncut Gems. À chaque fois, on suit un personnage faillible, à la limite misérable, entraîné dans une spirale infernale par sa quête d’argent.
La réputation des frères Safdie n’est plus à faire, autant en duo qu’en solo. Les deux sont de grands réalisateurs. Mais leur force réside peut-être davantage dans la direction d’acteurs. D’ailleurs, si Josh Safdie réussit un beau coup avec Marty Supreme, Timothée Chalamet lui, y va pour le grand chelem!


