Robert De Niro a trouvé ses rôles les plus emblématiques dans la peau de gangsters. Impossible d'oublier ses présences marquantes chez Martin Scorsese et au sein de films aussi différents que The Godfather II, The Untouchables et même la comédie Analyse That. Dans The Alto Knights, il n'interprète pas un, mais deux mafieux.
Pour cette histoire vraie, il prête ses traits à Frank Costello et Vito Genovese, deux chefs de la mafia italo-américaine de New York. Amis d'enfance, ils finiront toutefois rivaux, tandis que le premier échappe de près à une tentative d'assassinat du second. Peut-on prendre sa retraite d'un métier où l'on ne fait généralement pas de vieux os?
The Alto Knights qui représente un club social où se rencontrent des gens du milieu interlope avait tout du film testamentaire afin de revisiter l'immense carrière de Robert De Niro, l'un des acteurs les plus importants du cinéma. Cela ne prend cependant que quelques minutes avant de désenchanter. Le ton semble à la parodie involontaire tant il est difficile de croire ce qui arrive.
Le scénario provient pourtant de la plume du vénérable Nicholas Pileggi, à qui l'on doit les écrits des mythiques Goodfellas et Casino. Tous les clichés sont présents, de l'omniprésente voix hors champ à l'antihéros qui s'adresse directement à la caméra ou qui commente des photos de son passé. Le modèle est assurément Casino et l'on retrouve à nouveau ces anciens complices qui se retourneront l'un contre l'autre et cette épouse frustrée qui finira par révéler au grand jour les activités illicites de son mari et les membres de son entourage.
Le récit n'est pas seulement prévisible, il manque de densité. Il n'a pratiquement rien de nouveau à dire sur le rêve américain, se contentant de citer gratuitement l'excellent long métrage White Heat de Raoul Walsh. Sa progression sans suspense laisse indifférent et finit par ennuyer, empêtrée dans des situations prémâchées et livrée à l'aide de dialogues appuyés, où découle parfois un humour embarrassant. L'ensemble se termine néanmoins sur une conclusion satisfaisante - la meilleure séquence du lot - portant sur une rencontre de mafiosi qui tournent court.
La mise en scène sans personnalité de Barry Levinson singe celles de Martin Scorsese. Le cinéaste de 82 ans a signé ses meilleurs films - comme Rain Main et Diner - au siècle dernier, se contentant depuis, après une série de cuisants échecs (comme Bugsy, qui se déroulait déjà dans le monde des gangsters), de téléfilms. Il a beau multiplier les plans de caméras en mouvements et abuser du montage alterné, sa réalisation ne peut que décevoir, n'étant ni sincère ni en adéquation avec ce qui se passe à l'écran.
L'homme derrière des oeuvres aussi disparates que Good Morning, Vietnam, Disclosure et Sphere sait toutefois toujours diriger son acteur fétiche qu'il retrouve pour la cinquième fois (sa plus célèbre collaboration fut assurément sur le jouissif Wag the Dog en 1997). Robert De Niro est évidemment la raison d'être du projet et la principale raison de s'intéresser à cette création. Même si les deux personnages qu'ils incarnent s'avèrent plutôt unidimensionnels, l'acteur s'amuse à changer les postures et les voix, se livrant à quelques duels avec lui-même. Entre le diplomate Frank Costello et le caricatural Vito Genovese, on lui préférera facilement le premier.
Le comédien ne peut toutefois pas sauver ce film anonyme qui est indigne de son talent. Après des années de vaches maigres, la star est apparue récemment au sommet de son art dans Killers of the Flower Moon. Barry Levinson n'est évidemment pas Martin Scorsese et The Alto Knights, si passionnant sur papier, se relève ronflant à l'écran, sortant tout droit d'une autre époque. Son scénario circule d'ailleurs à Hollywood depuis les années 1970 et personne ne voulait le mettre en scène. On comprend maintenant pourquoi.