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Critique

Le spectacle 99 Nights, ou le meilleur de Charlotte Cardin

Sa voix a toujours été distincte par son tonalité et sa prestance, mais c'est munie d'une assurance et d'un sens de l'appartenance que Charlotte Cardin foulait la scène de l'aréna, ce jeudi soir, et ce, toujours avec la même candeur et délicatesse qui l'habitent depuis ses premières apparitions sous les projecteurs. C'était le premier de quatre soirs de concerts au Québec, à la maison, avant que l'artiste reprenne la route avec sa tournée 99 Nights pour la prochaine année.

À la maison.

Affaiblie d'un virus, la tournée 99 Nights a connu un faux départ en janvier comme la chanteuse a été forcée d'annuler une série de concerts en France et en Belgique pour se reposer. L'autrice-compositrice-interprète reprenait son micro plus tôt cette semaine à Ottawa, mais on pouvait sentir que de se retrouver devant son premier public et de s'abandonner complètement dans cet univers musical qui lui ressemble plus que jamais, marquait un nouveau coup d'envoi à la tournée.

« On faisait le 'soundcheck' cet après-midi et on se disait "je ne peux pas croire qu’on fait ça ici ce soir". C’est le plus grand endroit que j’ai vu de ma vie! », disait Charlotte, émue devant la salle comble et frénétique composée de plus de 10 000 personnes se dressant devant elle. Les billets se sont épuisés en un claquement de doigts, à l'annonce de la tournée, il y a quelques mois et c'est la première fois qu'elle se produit dans un aréna, chez elle.

La scène était occupée en première partie par le groupe alternatif New West qui plongeait la salle dans une ambiance particulière. Originaire de Toronto, le boys band a un registre assez varié, qui visite les genres country, pop, folk et rock.

D'une intime liberté.

L'artiste de 29 ans qui connaît déjà le succès à l'international a tout de même offert à son public un concert d'une intimité rarissime. C'est en enchaînant « Looping », « Meaningless » et « Puppy » que la chanteuse a ouvert le bal, oscillant ensuite entre ses plus grands succès, que tous chantaient en chœur, et ses dernières sorties. Certaines chansons, comme « Way Back », « Dirty Dirty », ou « Phoenix », interprétées avec beaucoup de liberté, prenaient une tout autre dimension avec la participation de son orchestre en direct. Voyez un extrait au bas de l'article.

Au niveau de la direction artistique, les jeux de lumière et projecteurs étaient plutôt minimalistes et sans artifice, sachant mettre en valeur la chanteuse et ses musiciens aux moments opportuns. Seul pépin de la soirée? Un mini problème technique qu'elle a vite désamorcé et qui est passé presque incognito. La vedette a profité de l’aparté de quelques secondes pour s’adresser de façon complice au public et souligner le travail remarquable de son équipe.  

Alternant entre chorégraphies désinvoltes, guitare électrique en main et des mélodies au piano, l'heure et demie de musique qu'offre Charlotte à ses fans dans ce spectacle s'envole en un instant. Puis, c'est sous l'effervescence du populaire titre « Confetti » que des milliers de poussières d'étoiles ont jailli du plafond et que l'artiste a clôturé son spectacle. Jusqu'à ce que...

Surprise, surprise!

Charlotte Cardin est réapparue, pour un rappel remarquable. Vivez le moment dans l'extrait vidéo placé en entête. « Je ne vais jamais oublier cette soirée. Et comme vous le savez, je suis à la maison, on est à la maison ce soir, on est entre nous. Et j’avais envie qu’on fasse quelque chose d’intime, j’avais envie de finir le spectacle sur une note juste à nous, quelque chose qui était intime et doux. Et ça fait 10 ans que j’essaie de trouver une façon de chanter avec la personne que je vais vous présenter dans quelques instants. Ça fait 10 ans que je suis vraiment en amour avec sa voix et je trouve que c’est vraiment l'une des plus belles voix qu’on a. On n'a jamais été capables de trouver un moment qui adonnait pour chanter ensemble avant ce soir. » C'est ainsi que Devon Portielje, le leader du groupe indie rock québécois Half Moon Run, s'est joint à la chanteuse sur scène.

Ensemble, ils ont livré une version unique de « Daddy », puis de « Sun Goes Down », avant qu'une silhouette connue se glisse discrètement au piano.

Enfin, parce qu'une surprise n'attend pas l'autre, c'est l'habile et acclamé Patrick Watson qui s'ajoutait au duo, devant une foule complètement ébahie. Ce n'est pas la première fois que l'auteur-compositeur-interprète travaille avec Charlotte, comme ils ont coécrit le titre « Next to you ». C'est d'ailleurs sur cette œuvre que le trio bouclait la soirée, après avoir offert une version de « Je te laisserai des mots » qui a tiré des larmes à de nombreux spectateurs. Est-ce le moment où l'on peut crier au tour du chapeau?

Rappelons qu'avec la publication de 99 Nights, 99 Nights Deluxe et le EP Une semaine à Paris, dans les derniers mois, la discographie de Charlotte Cardin s'est élargie, livrant le cheminement de la jeune femme avec encore plus d'authenticité. C'est probablement pour cela qu'elle est l'artiste la plus nommée aux Juno cette année.

Tantôt émouvante par sa simplicité inimitable, tantôt munie d'une élégante sensualité qui illustre bien sa part de mystère et de complexité artistique, mais toujours, toujours entraînante, Charlotte est une artiste dont le Québec peut être fier.

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