Louis Morissette se trouve bien malgré lui au coeur d'une tourmente pour des propos tenus dans la nouvelle mouture du Magazine Véro. Dans celui-ci, l'humoriste et producteur décrie le fait de ne pas pouvoir engager de comédiens blancs pour jouer des personnages noirs sans se faire vertement critiquer.
Rappelons que Morissette avait pris la décision d'engager Normand Brathwaite pour personnifier François Bugingo dans la plus récente édition du Bye bye.
Dans son article, Morissette parle d'une minorité de voix qui se fait entendre à ce sujet, les comparant à des « moustiques qui piquent, picossent et bourdonnent jusqu’à te rendre fou au milieu de la nuit ».
Voici un autre extrait de l'article en question : « En exigeant un traitement différent pour une communauté, on la ghettoïse. Qu'elle soit noire, asiatique, homosexuelle ou paraplégique, n'importe quelle communauté mérite de faire partie du groupe. Le rire et l'autodérision sont les symboles ultimes de l'inclusion et de l'esprit de corps. Quelle sera la prochaine étape ? Nous devrons avoir une troupe comprenant un Noir, un blond, une Autochtone, une femme ronde, une personne handicapée, un sexagénaire chauve pesant moins de 180 livres ? »
Malheureusement, l'article n'est pas disponible en ligne, ce qui ne nous permet pas d'offrir ici un portrait complet de la situation. Nous vous en conseillons toutefois la lecture complète pour vous faire votre propre idée.
Ces propos du producteur du Bye bye semblent avoir créé tout un tollé. En effet, depuis la parution de cette chronique, le terme blackface est au coeur des discussions sur les réseaux sociaux et Louis Morissette fait l'objet d'une pétition lui demandant des excuses.
Dans cette pétition, titrée « Nous ne sommes pas des moustiques », les signataires - qui s'élèvent maintenant à plus de 1200 - exigent entre autres des excuses : « M. Morissette a employé le mot moustique pour désigner la « minorité » d'individus qui décrient la pratique du blackface sur les médias sociaux et sous la pression desquels il a été « obligé » d'engager un comédien noir pour jouer François Bugingo lors du dernier Bye Bye.
Ce qu'on pourrait appeler l'« affaire des moustiques » s'inscrit dans un contexte plus large, où le talent des minorités québécoises échappe au grand public ou ne peut percer hors des médias sociaux. Une partie de la solution est pourtant là. Il faut faire amende honorable, mettre fin aux pratiques d'exclusion dans les médias, et augmenter le nombre de personnes racisées dans l'espace médiatique et culturel québécois. Ainsi, on pourra initier de véritables dialogues, avec toute la créativité qui peut en naître. »
On compte dans les signataires de cette pétition des personnalités politiques, dont le député de Mercier pour Québec solidaire, Amir Khadir.
En entrevue avec La Presse, Louis Morissette se dit ébranlé par cette controverse : « Je vais me tenir droit et assumer tout ce que j'ai écrit, mais je ne peux quand même pas assumer les résumés qu'on a faits de mon texte. Quand je me fais envoyer des tweets comme quoi je suis un sale raciste, je t'avoue que dans la catégorie des insultes qui peuvent me faire plier les genoux, c'est dans mon top 3 ». Morissette précise en outre deux choses dans cette entrevue : il n'a jamais dit qu'il ne voulait pas engager de Noirs et il n'a jamais traité les Noirs de moustiques. Et c'est vrai si on fait la lecture de l'article comme il se doit.
S'il semble regretter l'utilisation du sujet du blackface pour illustrer ses propos, Morissette précise que son article visait plutôt à s'exprimer sur le fait que les grands décideurs accordent parfois trop d'importance à ce qu'une poignée de personnes, quelle qu'elle soit, peut dire sur les réseaux sociaux.
Normand Brathwaite a aussi réagi fortement à ce sujet lors de son passage sur le plateau d'En Mode Salvail jeudi dernier. « Je suis entièrement d'accord avec Louis [...] Un moment donné j'ai appelé Véro et je lui ai dit « obstine-toi pas avec ce monde-là, ils veulent rien savoir ». Le blackface, c'est noir, c'est complètement noir, avec des grosses lèvres blanches et c'est fait pour rire des Noirs. Ce qu'on fait au Québec, c'est pour interpréter, ça n'a rien à voir. Moi je suis bien content de l'avoir fait, en plus je pense que j'ai fait une bonne job, mais je pense qu'il faut arrêter de se pencher devant ces gens-là ». L'entrevue, qui en dit beaucoup plus sur le sujet, est très intéressante et vous pouvez la revoir ici (à partir de 15 min. pour le sujet du blackface).
Le cinéaste et comédien Stéphane E. Roy a aussi offert un texte qui fait réfléchir sur le sujet aujourd'hui.
Un sujet chaud vous dites? Certainement!